Un mois sans concert, ce fut très dur. Mais MELECHESH était en prévision dans mon agenda depuis quelques temps et, malgré un engouement du public annoncé frileux, je songeais d'avance passer un bon moment.
Une soirée un peu en demi-teinte cependant, puisque j'ai d'un côté expérimenté de très bonnes choses mais me suis aussi rendue compte que j'avais sacrement vieillie.
On ne peut pas dire que le public fusse au rendez-vous; à peine 200 personnes, pour un groupe comme TIAMAT, j'en reste à l'idée que le public goth manquait cruellement à l'appel. Le froid, ou bien la taxe d'habitation à payer, une chose est sure, c'est que l'affiche n'a pas vraiment déchaîné les passions ni l'engouement d'un public aussi frileux physiquement qu'intellectuellement. tant pis ! pas de quoi se battre pour trouver une place non plus et puis de charmants compagnons avec qui la passer.
Devant un public distrait, comme à son habitude, va se produire STONEMAN. Le groupe est Suisse et rit lui-même de l'idée qu'on se fait de la Suisse. Ensuite, c'est très très Goth-metal et question créativité, on est quand même bien loin de SADNESS ou même encore de GRAUZONE.
Reconnaissons quand même beaucoup de courage à ces jeunes gens pour avoir joué devant une salle aussi chaleureuse que le temps extérieur mais avec moins de flocons dedans que dehors. On ne peut pas dire que le set fut particulièrement mauvais, non; ce n'est pas DXS ou DOPESTARS INC. , ce n'est pas forcément très bon, et surtout, malheureusement, le son n'est pas très original. , ils sont parfaitement dans la tranche de ce que j'appelle le « groupe à gonzesses » puisque, non content d'être jeunes et vaguement beaux gosses, on y trouve successivement les archétypes du métaleux, de l'Emo, du skateur et heu, du wannabee Carl Mc Coy ?. Attention cependant; le poussin fraîchement sorti de son œuf hésite encore entre le gothabilly et le punk. J'avoue être trop vieille pour me retrouver chavirée à la vue d'un torse lisse comme une peau de bébé et qui arbore le « sooooooooo Goethe » tatouage façon suicide-girls. La voix fait penser à du 69 EYES, mais elle manque encore d'aplomb dans la maturité et la bouteille de Rye. Ensuite, 69 EYES, les ayant vu à leurs tout débuts, STONEMAN a encore le temps d'évoluer et, pourquoi pas, de finir pas être intéressant.
La reprise de COCAINE de JJ.CALE est une bonne idée, je lui ai trouvé manquer d'intellect ou même encore de cette petite point d'humour désinvolte que CLAPTON y avait mis.
Il va s’avérer cependant que, comme beaucoup de groupes Suisses, STONEMAN s'avère largement plus « écoutable » lorsqu'ils chantent en Allemand. En parallèle, même leur musique est meilleure; plus de dynamisme, plus de cœur aussi. , ils surfent un peu sur la vague de tout ce qui marche puisque la dernière piste est une n-ième histoire de Zombies ( et dieu sait que j'aime les zombies moi).
Bon, passons maintenant au second concert, pour lequel le petit groupe d'irréductibles s'avérait déjà un peu plus grand. On reste malgré tout dans une quantité relativement faible; pas même suffisamment de monde pour se faire une bonne bataille de réchauffette hélas. Dieu merci, on a toujours la bière !
La seconde formation fait la part belle aux blonds; très très blonds, très cheveux longs et surtout allemand.
Je n'étais pas venue au concert dans l'idée d'apprécier autre chose que MELECHESH, mais au final, je repars bien contente d'avoir découvert ORDEN OGAN.
L'introduction très « épique » ne m'a pas accrochée plus que cela puisque la plupart des groupes actuels en utilise une, souvent empruntée aux blog busters du cinéma de ces dernières années. Ce qui est plutôt malheureux puisque la pièce d'ouverture, tout comme celle d'INSOMNIUM s'avère une composition originale qui n'a rien à envier aux JOHN POWELL et autres TYLER BATES. C'est la voix de SEBASTIAN LEVERMANN qui m'a plutôt tirée l'oreille, avant même de pouvoir assister au concert de mes propres yeux. En effet, ORDEN OGAN, groupe power metal tout en étant folk, utilise un chant clair, souvent en harmoniques.
La voix de Sebastian est d'un timbre assez haut, jouant plutôt dans les ténors que les habituels barytons. A la différence d'autres formations que j'ai précédemment eu l'occasion de voir sur scène, il sait parfaitement poser sa voix, effectuer les tenus et manier les trémolos dont il est très loin d'abuser. Le cœur passe par la voix; dans le cas de Sebastian, celui-ci est fort et généreux. On est bien loin des couinements et autres aboiements gnian gnian souvent agressifs que l'on retrouve traditionnellement dans l'Epic ou le power metal. J'arguerais volontiers qu'on a là, dans la maîtrise de l'organe, une véritable monstration des différences culturelles entre les allemands et les italiens, ces derniers étant plus enclins à la comédie et à l'excès. De surcroît, les chœurs et autres passages multichants sont dans la lignée direct des compositions de BEETHOVEN ou BRAHMS (j'avancerais également MAHLER, mais ce dernier est Autrichien). Donc, pour moi qui suit tant sensible à la voix, ORDEN OGAN me met dans tous mes états.
Une comparaison musicale concernant les fils de Bismarck. Je ne reviens pas sur le fait que, dans certains domaines, ils n'ont aucune sensibilité alors que s’agissant de metal, ils ont au contraire tendance à exceller. Plus particulièrement si je prends ORDEN OGAN et ses champs sémantiques traditionnels, je les mets directement en perspective avec SALTATIO MORTIS, qui est quant à lui rattaché à la scène goth. Les deux ont une approche au départ totalement différente de la musique folk, et pourtant, il n'est pas difficile d'y relever bon nombre de ressemblances. Afin de trancher entre les deux, j'avancerais que SALTATIO MORTIS propose une composition proche de celle du « moyen-age », alors que nos braves petits gars de ORDEN OGAN, puisent dans les acquis du romantisme allemand. Les thèmes folkloriques sont également différents, mais c'est une notion qui va de paire avec les arrangements musicaux. Autres temps, autres Mœurs.
Musicalement, le groupe se défend vraiment très bien. Les compositions sont tour à tour réfléchies, toutes en douceur et extrêmement dynamiques à d'autres moments. C'est puissant, sans pour autant tomber dans la redondance et l'excès de performance que je reprocherais à DRAGON FORCE. Les accélérations et autres modulations du rythme sont calées à la perfection; L'ensemble est logique et cohérent, sans pour autant en devenir chiant comme sur certaines pièces de RHAPSODY OF FIRE. Les claviers surtout sont utilisés de manière extrêmement judicieuse, sans débordement, ni mise en second plan. Les mélodies sont faciles, accrocheuses au possible, on a une bonne illustration du continuo durant l'ensemble des pistes. Le niveau général est bon. Les solos de guitare sont plus que correctes, on aura eu l'occasion de voir bien pire. Sebastian Grütling évolue avec beaucoup d'aisance au milieu de ses fus et utilise l'ensemble de son matériel de manière aérienne et rigoureuse.
Le set est brillant. Et le dynamisme des membres du groupe rend la performance exceptionnelle. Ils sont tous mobiles et non content des harangues répétées de Sebastian Levermann et Nils Weise à l'encontre du public, on perçoit un très fort esprit de groupe (en outre, ils portent tous le T-Shirt du dernier album). , je dis toujours que lorsque les artistes se plaisent à jouer, la performance en devient délectable; Or, ORDEN OGAN ne se cache pas aimer jouer sur la scène du Trabendo ce soir. Le sourire est une arme des plus redoutables et, dans le cas présent, réussit à dégeler les cœurs congelés du public.
C'est donc tout naturellement que la réponse de celui-ci envers le groupe sera enjouée, en réponse à la qualité du show proposé.
Manque de bol pour moi et dieu que je m'en veux (çà me servira de leçon en fait), ma bourse était déjà vide lorsqu'il m'aurait été donné de pouvoir soutenir ces forts gentils garçons en achetant le dernier album (qui, selon certains passage me fait penser d'emblée à LINGUA MORTIS). qu'importe ! Noël arrive et le père Noël m'aura trouvée (espérons le) fort gentille durant cette année.
C'est donc une salle réchauffée qui va accueillir MELECHESH, dans un style totalement différent d'ORDEN OGAN ou STONEMAN.
La scène arbore pour l'occasion un petit tapis persan et les techniciens viennent allumer des bâtonnets d'encens.
J'avais découvert MELECHESH, considérant que le son général ressemblait assez à celui de KARL SANDERS lorsqu'il s'adonne à son projet solo. Grand mal m'en a pris, puisque il faudrait plus logiquement considérer l'inverse, au regard des origines de chacun.
Le groupe est originaire de Jérusalem, mais se trouve désormais basé aux Pays Bas. L'histoire du groupe, ainsi que ses aléas, a certainement contribué initialement à attirer l'attention du public sur eux, mais c'est tout à fait autre chose qui m'a poussé à vouloir assister au concert qu'ils donnaient, n'ayant eu connaisse de cela que très récemment.
Afin de donner une définition à ce que propose MELECHESH, j'utilise donc le terme par lequel ils se définissent eux-mêmes : « Mesopotamian Metal ». Une bien large définition pour expliquer la base de leur recherche mais qui colle quand même plus radicalement que « oriental black metal ».
N'en doutons pas, MELECHESH propose initialement deux concepts : du Black Metal, et de la musique plus traditionnelle de Mésopotamie (c'est à dire entre le Tigre et l'Heuphrate. Un peu de culture, çà ne fait jamais de mal), ou plus communément appelées « croissant fertile ».
Les thèmes étudiés font référence traditionnellement au culte panthéiste de la région ou bien à l'histoire antique du même métal. Ne serait-ce que pour se documenter, le groupe propose de bonnes bases et l'on reste dans les champs sémantiques habituels. Pour une fois que les mythologies ne sont pas nordiques ou pan-germaniques, il faut réellement prendre le temps de s'arrêter sur MELECHESH.
Les textes des morceaux sont bien écrits et l'on y trouve une grande matière.
Malgré un base de sujets mainte fois rabâchée, MELECHESH va plus loin dans sa démarche et son développent ; ésotérisme, mysticisme, sciences occultes, histoire et culture, le groupe, et plus particulièrement Ashmedi, compulse et développe ses sujets avec finesse et précision. La masse de connaissances et la retranscription de celles-ci, mises en perspectives, est assez étourdissant. L'écriture ne laisse aucune place à l'à peu prêt, les sujets sont clairs et développés avec maîtrise.
Dans la composition, Ashmedi ou Moloch utilisent traditionnellement la gamme diatonique de sept tons, que l'on retrouve dans la musique antique de la Mésopotamie. Ils réussissent à faire une excellente fusion entre Metal et tradition. Qu'il s'agisse des partitions des cordes ou bien de la batterie, la transposition est clairement audible; une base antique, évoluant sur le demi voir le quart de ton, un rendu au final très actuel, illustrée de mélodies compréhensibles sur plusieurs niveaux d'écoute. Les solos de guitare sont dynamiques et rapides, véloces également. Leur niveau ne peut être remis en question; du tout. Moloch et Ashmedi se partagent d'ailleurs avec aisance le rôle de lead guitare et l'on en perd parfois son latin tant la balance entre les deux est efficace. Ashmedi possède en plus une voix high pitch habituelle du Black Metal; le ton est sec, le phrasé dynamique et même parfois martial. Le timbre est agréable, parfaitement intégré aux partitions. Point d'oreilles à saigner à la fin de l'écoute, ni de démangeaisons de tympans.
Donc, je vais le dire une fois encore, MELECHESH c'est très bon.
Mais au delà de leurs qualités musicales certaines, c'est le « phénomène » induit par leur art qui s'avère le plus intéressant. Tout le monde, plus ou moins, parvient en ce sens à « créer » son petit égrégore à lui. Chacune de ces créations n'a en général que peu d'influence, peu de persistance également, sauf dans certains cas où, par choix, la musique est substituée à une action plus profonde et moins divertissante. Le cas MELECHESH est alors des plus intéressant; au départ de l'écriture musicale, il semble que la compréhension du groupe aille bien au-delà du simple fait artistique. Comme chez d'autres mais sans l'aspect ritualisé ou cérémoniel, le show développe et construit en continue une osmose quasi-spirituelle autours de la performance, parvenant à la fin à un état général impressionnant. L'attention du public, bien malgré lui se retrouve canalisée, emportée et stimulée par ce que ses sens expérimentent. Le phénomène peut s'apparenter à du mesmérisme et seuls les esprits les plus ignorants et les âmes les plus faibles n'y seront pas sensibles. MELECHESH, c'est l'expression même de l'appel d'Ereshkigal; Le divin perçoit ce qu'il y a « au-delà ». L'égrégore créé est puissant et surtout vivace, limite palpable et sans pour autant s'alimenter insidieusement du public. D'autres y parviennent également, je le redis; mais « l'entité » créée par Ashmedi et Moloch est neutre, dépourvue du manichéisme ou de l'empreinte humaine que l'on perçoit vulgairement.
L'étude des cultes et de la culture Mésopotamienne s'avère une arme puissante dans les mains des protagonistes. Nul doute que l'expérience marquera, même de manière inconsciente les esprits de beaucoup.
J'avais vu ce pour quoi j'étais initialement venue me peler les fesses ce soir mais je trouve qu'il aurait été faire affront aux membres de TIAMAT que de quitter la salle derrière la performance d'Ashmedi et Moloch.
Et c'est là que j'ai pris mon âge en pleine face.
Il y a de cela quelques (nombreuses) années, assister au concert de TIAMAT m'aurait je pense réjouie. Aujourd'hui, malgré les qualités indéniables du groupe et surtout du show, il m'a été quasiment impossible d'en supporter la majeure partie.
Le concert n'est pas mauvais, bien au contraire; mais les timbres utilisés, les rythmes et surtout l'accroche vocale me sont devenus insoutenables. La musique à « goth-suicidaire » m'indispose désormais, j'aspire à autre chose. Dieu sait pourtant que j'aime le death et le Doom-death. il y a quelque chose dans le « goth-metal » que je n'arrive plus à apprécier. Dieu merci, malgré la faible population présente, on pouvait quand même voir au premier rang la traditionnelle « gothopouf » agiter son petit push-up sous le nez de Johan Edlund, les yeux remplis d'une lumière enamourée et gourmande. Ce par contre pour quoi je reste irritée, c'est l'absence presque absolue du public goth. Ce milieu n'a de cesse de se faire ronfler et pourtant, les faits sont là. Superficiel et illusoire comme il l'est, aucun de ses membres autoproclamés illustres n'aura pris la peine de venir soutenir l'un de leurs hérauts.
Je dis toujours que pour que la scène soit active, il faut soi-même la faire vivre. Ce soir fut l'expression flagrante de la dichotomie entre les actes et les paroles. Toute chose étant relative, alors que le milieu Metal se plaint lui aussi, c'est surtout pour la scène goth parisienne qu'il faut réellement s'en faire. Avec la fermeture et le rachat de la Loco, il n'y avait déjà quasiment plus d'opportunités. Mais avec la déconvenue de TIAMAT ce soir, il est fort à penser que les choses ne seront pas amenées à s'améliorer dans l'avenir. Le milieu se veut décadent, qu'il décade en toute impunité. Rien n'est pérenne dans le temps.
Une fin de soirée sympathique également puisque aussi bien MELECHESH que ORDEN OGAN s'avèrent disponibles et chaleureux. Possibilité donc, sans les faire mourir de faim ou de froid, de discuter quelques instants avec des gens fort agréables (Moloch parlant un Français d'une qualité supérieure à beaucoup de Français eux-mêmes).
Un événement agréable que ce concert, même s'il ne s'est pas agit d'une grosse fête. J'en suis revenue enchantée, puisque la soirée ne s'arrête pas, à mes yeux, à la rentabilité d'un billet. J'aime découvrir, et j'ai découvert les têtes blondes d'ORDEN OGAN. J'aime juger ( et râler je l'avoue), TIAMAT m'en aura donné l'occasion. J'aime aussi conforter mes idées et éclaircir mes supputations, merci donc à MELECHESH dont la performance et son « étude » sont allés au-delà de mes espérances.
Ensuite, parce qu'il me tient à cœur d'en parler, je recommande très fortement le dernier album d'ORDEN OGAN. Si le public qui rebute traditionnellement sur le chant clair parvient à passer outre, les qualités musicales sont très bonnes et l'album tout entier est un vrai petit bijou.
La présence aux concerts présente l'avantage de soutient actif aux artistes. l'achat des albums est à mes yeux le symbole principal de notre gratitude envers ces derniers. Je rappelle donc une fois encore que si l'on aime vraiment, on achète, en remerciement du bonheur que l’écoute de l’œuvre nous apportera.
14 décembre, 2010
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