Le 31 c'est Samhain; quoi de plus judicieux alors, que d'assister à un concert de OtW&TM alors que c'est la nuit où le voile est le plus mince. Enfin si, aller courir nu dans la forêt en espérant croiser esprits, revenants, faunes et autres créatures de Faérie. Mais quand même; rares sont les élus et le prix à payer pour un concert est toutefois largement moins conséquent que de se laisser embrasser par Obéron.
Après l'indus Ambient fort décevant de INADE que nous avait présenté AU-DELA du SILENCE, j'ai été agréablement soulagée de prendre connaissance de l'affiche que celui-ci proposait pour le second volet du KOSMO-KINO PLAZA. Non seulement par connaissance de la tête d'affiche , aussi parce qu'il était annoncé une soirée spéciale Folk.
J'aime bien la folk musique; Dark ou Néo (surtout pas metal par contre), j'y trouve toujours plus ou moins mon compte. C'est reposant, rafraîchissant et n'est pas agressif. En outre, l'égrégore généré durant ce type de performances est totalement différent de celui de la scène Metal. Les deux, à comparer, sont intéressants pour les schémas utilisés, les moyens empruntés et les résultats qu'il en découle.
Je me remémore encore maintenant avec beaucoup d'émotion, le merveilleux concert de DER BLUTHARSCH auquel il m'a été donné d'assister l'an dernier. Sans aller jusqu'à en attendre autant, je présageais un agréable moment.
AU-DELA du SILENCE nous invite cette fois-ci à nous rendre au théâtre KIRON, dans le 11ème arrondissement. Le lieu n'a rien à voir avec le CINEMA L'ARCHIPEL; L'endroit et joli, plutôt bien conçu et relativement clair et accueillant. Par contre, on est aussi mal assis dans un cas comme dans l'autre.
Les gens arrivent tard pour un concert de folk. Pas de fervents admirateurs comme on peut en voir pour les concerts Electro ou Metal. Un public frileux et un ressenti qui ne l'est pas moins. Les portes du divin sérail s'ouvrent là aussi en retard, mais le temps est resté clément pour les pauvres badauds que nous fûmes l'espace d'une soirée.
Je n'attendais rien de la première partie du concert. J'avais à peine pris le temps de me renseigner sur ROMA AMOR, me disant que de toutes façons, bah ! Il s'agirait d'une première partie.
Un petit groupe de Neo-Folk italien, deux musiciens sur scène, deux petits gabarits de surcroît, pas de quoi, à première vue, casser trois pattes à un canard. Mais les apparences sont trompeuses et je me suis clairement faite blouser.
ROMA AMOR fait partie de ces formations qui assoient leur force non pas dans leur visuel ou bien dans la puissance de leurs compositions. Du tout. La grande valeur du groupe est beaucoup plus subtile et la découvrir demande un peu plus d'attention et de cœur. Le groupe commence son set par du Jacques Brel, en anglais dans le texte. Euski a sa petite guitare, Michele son petit accordéon. Les protagonistes semblent quelques peu stressés et pourtant la réponse chaleureuse du public va les mettre en confiance.
La composition tourne principalement autours de la voix féminine et la composition n'est, certes pas transcendante, mais elle ne mérite pas le courroux des ménades. Les arrangements sont dépouillés, on reste principalement dans de l'acoustique. Les ritournelles se mémorisent assez bien,
La formation est italienne; Euski n'a pourtant rien à voir avec la Cicciolina ou Sabrina Salerno. Même Asia Argento correspond plus aux idées que l'on se fait de l'Italienne dans toute sa splendeur. Cependant, on remarque le timbre singulier de sa voix. fluette et réservée, elle va tout au long du set gagner en ampleur, en corps, en fermeté. Et j'irais même jusqu'à dire, sans arrières pensées, que sa personnalité entière finit par éclore. Du petit bout frêle et fragile dont elle a l'apparence, Euski va s'avérer posséder la force des vraies femmes de pouvoir, capable tout à la fois de fédérer sous leur bannière sans pour autant renier leur sexe. J'adore. Le champ musical du groupe y fait d'ailleurs totalement référence puisque l'album sorti en 2009,« FEMMINA », narre l'existence et les aventures de femmes de pouvoir ou fameuses de la région de Bologne dont ils sont originaires. Entre les histoires de sorcières, de femmes passionnelles ou passionnées, on fait le tour du culte. Je trouve çà d'ailleurs assez amusant que l'on puisse retrouver aux quatre coins de l'Europe cette récurrence; que cela soit l'Italie, illustrée ce soir par ROMA AMOR, ou bien MACBETH (on pourrait aussi citer les PARQUES), on retrouve cette fascination de la complétion féminine. La chose étant que cette adoration séculaire, teintée tout à la fois de haine et d'amour, me fera toujours sourire.
Au final, le tout étant subtilement emballé, le public est sous le charme. Du moins je le suis. ROMA AMOR nous offre d'ailleurs sous l'impulsion du public et de monsieur loyal, un rappel qui finira de peaufiner le set. « Les amants de la Saint Jean », c'est con comme la lune, parfaitement éculé, mais cela fait son effet. Et surtout avec une voix « à l'italienne » sortant d'une adorable petite belette. L'hommage scelle le début d'une soirée dont je n'attendais rien.
Oui. Je suis d'ordinaire extrêmement dure et très souvent assassine envers le corps féminin dans l'art, et plus particulièrement la musique. Cependant, les qualités intrinsèques de ROMA AMOR m'ont emballée. Euski embrasse totalement sa position, les choix musicaux et sémantiques sont pleinement assumés et soutenus avec rigueur. J'aime les femmes de tête; j'avoue. Et la suite du concert n'aura fait que confirmer mon inclinaison.
La seconde partie s'annonce avec Rose McDOWALL; Mais avant cela, la violoncelliste de la formation va nous présenter les prémisses de son projet solo. L'instrument est électro-acoustique, il permet donc de jouer sur les boucles et les distorsions. Et c'est en fait en cela que repose le truc et tout le truc.
On évolue dans le post-modernisme et plus précisément dans le post-minimalisme (j'envisage d'ici la levée de boucliers quant à ma prise de position). Parce que, de musique « moderne » ou « industriello-ambient », il s'avère que l'on touche plus à la composition classique, vue par BERIO ou REICH. On peut aisément arguer que l'ensemble tend à rappeler le principe de mélopée antique ou de l'écriture grégorienne, mais le minimalisme y puise ses bases. Donc, l'écriture est minimaliste. Jo Quail débute son morceau sur une note rigide, tenue et plaintive, puis va broder dessus grâce à l'ensemble de ses pédales. Les boucles se chevauchent, s'entremêlent et se superposent dans un ensemble de plus en plus complexe, tout en restant sur une mesure étirée. La progression du chant de l'instrument est bien gérée puisque l'ensemble suit une logique expansive, suivie par une phase d'abandon progressif des dites boucles, pour au final ne laisser entendre qu'une note tenue unique, intéressante epanadiplose musicale. Je ne peux m'empêcher de comparer le travail de Joanna à la performance de A SILVER MONT ZION. La limite entre le Post-Rock et le Minimalisme se révèle chaque jour un peu plus mince...
La performance est bien accueillie, malgré une réserve habituelle quant à la nouveauté qu'elle qu'en soit le contenu.
Je n'aime pas le public de la scène Dark-Folk. Je le disais pour INADE, le concert de ce soir m'a confirmé mes impressions initiales : un ramassis de pseudo-intellectuels qui s'écoutent parler en se regardant le nombril, limités dans le champ des possibles, mais convaincus que leur raison et leurs choix sont les seuls et uniques valables. L'idée de souveraineté culturelle, cultuelle ou autre me fait chier. Dieu merci, on ne demande pas d'offrir son âme au grand Satan pour assister aux performances de ce milieu; j'y croise ainsi avec un grand soulagement quelques ovnis qui, comme moi, outrepassent l'idée ségrégationniste du milieu. Et puis, tout étant relatif, toute cette tranche de population n'est pas complètement bonne à balancer aux ordures; certains s'avèrent même être d'une personnalité fort affable. Mais attention, ces gens sont comme les huîtres;
Quand on y trouve une perle, on se la garde discrètement et précieusement.
La seconde partie « bis » voit donc arriver la formation complète de ROSE MC DOWALL & FRIENDS.
Madame Mc Dowall est un adorable pokemon; ne culminant pas à plus d '1,55 mètre, elle porte de longues bottes compensées, avec lesquelles elle semble avoir parfois un peu de mal. Une petite robe noir à col blanc monté, façon none of that et, le détail absolu, le canotier. Le rendu général fait très poupée de porcelaine. Cependant, elle possède elle aussi une présence peu commune. C'est son côté reine des glaces qui m'aura le plus impressionné, puisque, du set elle n'aura fait preuve d'aucune d'expression. Elle ne s'avère pas non plus très loquace et son rapport avec le public est donc assez froid. Vite arrivée sur scène, vite repartie également.
Le set par contre est très bon.
J'en ai entendu plusieurs, comparer Mme Mc Dowall à NICO. J'émets des réserves quant au rapprochement logique que l'on puisse faire entre les deux. Déjà parce que la maîtrise vocale de Nico laissait à désirer mais surtout parce que leurs voix sont totalement différentes. Mme Mc Dowall possède ce timbre que l'on retrouve principalement dans la country; Une voix High pitch de femme mure, parfois tremblante, parfois murmurée, tout en brillance et en pureté. Les compositions sonnent psyché-rock mélangé à de la country justement; L'ensemble utilise le même principe d'ailleurs puisque c'est triste à se pendre. Je ne peux m'empêcher de lui trouver des airs de KATE BUSH ou DOLLY PARTON. Les grands yeux noirs, la bouche sanguine...
Musicalement c'est plutôt bien, et me rappelle « FLYING HIGH ». Une mention toute particulièrement pour « Let There Be Thorns », qui me touche plus particulièrement. Le set va être long. Dans le cadre de la soirée, le prix de la place aura été rentabilisé. Pas de rappel cependant, au grand désespoir de certains.
Notre fameux public est conquis, et cependant la réaction était prévisible.
Rose McDowall a beaucoup collaboré avec des artistes comme Douglas Pierce ou Boyd Rice. Elle évolue et compose dans des sphères musicales au bon goût de papier jauni. cela engendre forcément certains raccourcis, certaines associations dont est coutumier ce « fameux public ». Certains devaient cependant s'attendre à un show un peu plus proche de ce que proposent les artistes sus-cités; grand mal leur en fera, puisque le set est tout en douceur, tout en rondeur, avec des couleurs tirant plus sur le vieux rose ou le soleil levant.
J'en ressors là aussi emballée, malgré un retard des plus conséquent. Qu'importe, j'apprécie pleinement ma soirée qui est jusqu'à présent délectable. Le grand final s'approche.
Avant que les protagonistes du groupe n'entrent en scène, on peut ressentir une tension parcourir l'assemblée. Une forme de conscience attentive, à la limite de la prédation, fébrile et plus ou moins carnassière. : OF THE WAND & THE MOON : semble appartenir à cette frange musicale qui se trimbale bien malheureusement une réputation floue et tendancieuse, attirant de fait des amateurs du sensationnalisme. L'ensemble desservant à mon goût un groupe comme celui-ci.
La prestation du soir accueille aussi la présence de JOHN MURPHY aux percussions, nom fameux devant l'autel de l'industriel et de la musique décalée. Du beau monde en perspective donc.
Une set list longue, mais des morceaux courts. J'ai toujours du mal avec les fins abruptes de ceux-ci; Je trouve que cela laisse une sorte de frustration tant il n'en est aucun à jeter. Parce que dans le cas de OtW&tM, qu'il s'agisse d'une performance live ou bien d'une écoute d'album, le rendu est tout aussi fameux.
Les arrangements sont accrocheurs, la voix de Kim Larsen est suave et feutrée à souhait. Des morceaux en général composés sur des tons majeurs qui laissent cependant planer cette impression de retenue ou de réserve associée à l'utilisation de la diatonique, touche sensible dans un contexte musical froid et souvent brut.
J'ai été submergé par la musique de OtW&tM; une musique qui touche directement au cœur, le faisant tressaillir et le débarrassant de ses pelures déjà mortes. Quoi de plus naturel en soi puisque les inspirations son principalement puisées dans la culture pan-germanique. Des débuts, on retrouve l'empreinte d'une grande sensibilité de cœur, mais au fil du temps, c'est plus l'amour de Gaïa qui ressort. L'idée des courants naturalistes du 19ème est donc largement embrassée. On parle beaucoup du rapport à mère nature, de l'attraction et de l'aspiration à la terre, du culte du soleil.
Les sentiments sont assez purs, voir même parfois un peu candides, mais c'est justement parce que la construction est débarrassée de toute sorte d'allitération ou d'ornement superflus qu'elle parvient à créer cette ambiance si singulière à ce courant musical.
En fait, la Néo-Folk est une musique très organique. Les mélodies sont construites sur une structure logique de 4/4 ou 3/3 pour les morceaux à connotation plus affective, rien de plus complexe. Les harmoniques sont simples et utilisent la forme de la tierce au mieux pour donner du volume à la pièce. La composition est peu complexe, et les instruments restent dans des timbres naturels. Ce sont surtout les percussions qui permettent, le cas échéant, de donner une brillance ou bien l'aspect solennel à tout l'ensemble, en soutient au texte, ou plutôt en illustration de celui-ci. Le phrasé laisse la porte ouverte à l'esprit, et les idées ne sont pas cloisonnées par des points finaux et des fins des phrases a la musicalité consommée. Sans tomber dans un dépouillement total, les accroches légères qui ponctuent l'ensemble des pièces, permettent de maintenir l'attention de l'auditeur, l'empêchant de tomber dans un ennui, malgré tout coutumier du genre.
On pourra dire ce que l'on voudra, le petit monde de la folk, dark ou néo, est en général plus
coutumier d'horreurs inaudibles et surfaites que de réels artistes ou de créations dignes de considération.
Ensuite, je n'arrive toujours pas à me décider sur quel ou quel pièce pourrait être la meilleure puisque dans Of The Wand & The Moon, tout est bon et rien n'est à jeter (comme dans le cochon). Une mention particulière cependant pour « My Black Faith » tiré de Sonnenheim. Ensuite, chaque morceau est comme un printemps succédant à l 'hiver constamment renouvelé.
Une mention spéciale concernant les soucis de matériel que le groupe a expérimenté durant la performance. Sans la présence d'esprit de certain, Monsieur Murphy se serait vu amputé d'un fut, au demeurant dangereux. Merci donc à qui de droit d'avoir pris l'initiative de lever son joli petit cul pour être allé repositionner le dit accessoire.
La soirée se sera terminée avec beaucoup de retard et nous avons donc passé l'heure du sabbath en écoutant précisément Of The Wand & The Moon. L'instant fut donc surréaliste, un tantinet magique même puisque durant le passage du voile c'est bel et bien l'un de ses avatars qu'il nous était donné de percevoir.
Le retours au bercail fut étrange, ne sachant pas trop s'il s'agissait de ce monde ou bien d'un autre. Marcher en s’interrogeant si l'on touche le sol ou bien l'espace est une expérience chaque année renouvelée en diverses occasions. En ces brefs moments, c'est l'âme tout à son entier qui se trouve partagée, ne sachant choisir de quel côté du miroir elle préfère respirer.
Le concert proposé par AU DELA DU SILENCE fut donc déjà une excellente soirée de part sa présence concrète, appuyée dans le réel et sa physique Aristotélicienne. Mais, et peut-être cela n'avait-il pas été calculé, la date et le retard de la performance de Of The Wand & The Moon tombait à point nommé.
Un délicieux et merveilleux moment.
Il serait donc fort préjudiciable que je m'abstienne de cette musique que j'apprécie fortement pour des considérations bassement matérielles comme un public que j'exècre et dont les bijoux les plus significatifs sont déjà ternis de leur ennui profond.
13 décembre, 2010
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