J'ai réclamé à corps et à cris d'avoir l'opportunité de faire des concerts autre que de métal. J'ai du tellement irriter le continuum espace temps ou bien les Dieux de l'Ennui que mon souhait a été exaucé et plutôt rapidement.
C'est donc au dernier moment que nous nous décidions à aller voir SCOTT KELLY en concert au Glaz'art. La soirée était prévue pour être calme et reposante, à la vue du dossier de presse que le monsieur avait fait parvenir à la salle pour présenter le contexte de sa prestation. Lui, tout seul avec sa guitare et en face, le public.
Ce fut effectivement le concert mon plus reposant. Paradoxalement, et parce que les dieux aiment bien se venger, c'est celui qui m'aura laissé la plus grosse casquette en plomb. Parce que quand chacun paye sa tournée, ce serait outrageant de refuser son verre et de ne pas rendre la pareille.
.CUT, le monsieur Laurent Boyer de l'alternatif, m'avait conseillé d'aller voir ce concert. Et la veille, c'est monsieur GARMONBOZIA qui m'a rappelé que SCOTT KELLY passait à Paris. Alors donc, soyons fous, nous y sommes allé en bande à l'arrache, sans même prendre la peine d'acheter nos billets en prévente.
A la différence de mes précédents comptes rendus, je vais donner un bon point au Glaz'art. C'est toujours fort Knox, avec ouverture de sac et palpations en règle mais cette fois-ci, les agents de la sécurité se sont avérés plutôt agréables et même joviaux. L'accueil du public, même pour un concert, c'est quand même une entrée en matière assez décisive et celui auquel nous avons eu droit ce soir était fort sympathique. Et puis j'aime bien qu'on me dise que mes deux kilos de sac pleine peau sont bien rangés.
Je suis agréablement surprise de voir que le public a cette fois-ci répondu présent à l'appel. Certes la salle ne dégorge pas mais il y a quand même un peu de monde. Et je trouve que pour de l'alternatif c'est réconfortant. En outre, même si un thon çà ressemble à un autre thon, çà sent aussi vaguement l'esprit et l'intelligence.
Bon par contre, je préviens de suite. C'est en fait le premier concert (mais je ne pense pas le dernier) que je vais avoir fait en meute. Donc le contexte et l'ambiance ont été un peu biaisés puisque la dynamique de groupe est différente. Et puis surtout, comme j'y ai bu comme un trou (après les apéros, le vin pendant le repas etc.), ma perception s'en est trouvé largement modifiée.
La soirée s'articule sur deux formations. BLACKTHREAD et SCOTT KELLY. A postériori, on pourrait penser que les deux sont totalement dissociés en terme musical, et cependant, dans ce cas-là, c'est la présence d'un public spécifique qui permet d'en faire la liaison.
Nous commençons donc par la performance de BLACKTHREAD. Le monsieur définit sa musique comme de l'Ambient minimaliste et surtout (on en apprend tous les jours), comme du Shoegaze. Après avoir lu, ou relu, la définition des genres sus-cités, oui en effet, il a une bonne connaissance de ce qu'il fait. Ce qui est intéressant d'ailleurs parce que beaucoup d'artistes se définissent selon leurs propres critères sans réelle compréhension de leur musique. Ensuite, les étiquettes, on peut toujours arguer qu'on leur fait dire ce qu'on veut.
Le son de BLACKTHREAD possède une bonne cohésion, sans pour autant pêcher par sa diversité. L'ambient transporte l'auditoire dans de nombreux et riches tableaux : une cuisine baignée par un soleil d'été d'où se dégage une odeur de cookies fraichement sortis du four, qui m'a fait pensé à THE BOTHERSOME MAN; la mise en musique du HORLA, la fête foraine de Pripyat telle qu'on peut la voir dans MODERN WARFARE 1, ou bien encore le plan de conscience suspendu lorsque l'esprit d'Ada réfléchit entre la vie et son piano.
BLACKTHREAD nous promène au son de ses créations et de sa voix éthérée autour de tout un ensemble de tableaux, à la fois extrêmement vivaces aux sens et à la pensée, mais également avec cette impression fugace du mirage à peine décelé que laisse le voyage onirique. Le set se décompose en morceaux bien distincts, avec une idée de création et de rendu relativement différents. Comme beaucoup de structures dans les milieux de l'ambient (qu'on dira post-industriel), P.G.D s'accompagne d'une guitare, accessoire plus relatif à l'impression qu'il cherche à donner qu’à l'idée même d'une partition musicale. Afin de consolider cette perception de l'ambiance, il s'adjoint l'aide d'éléments pour le moins rudimentaires puisque les claves permettent de marquer les césures de ses phrases musicales ou vocales, ou bien encore le soutient dissonant et essoufflé d'un mélodica pour gamins. La conception semble plutôt enfantine, voir même arriériste. Cette approche aliénée de l'âge adulte rappelle un peu la démarche du SPK, tout en conservant l'ambivalence sur la santé mentale même de l'artiste. P.G.D me rappelle un peu l'impression que m'avait faite DEUTSCH NEPAL; il possède un charisme discret et mouvant, qui évolue au gré des morceaux qu'il nous interprète. Tantôt menaçant, tantôt fragile et abstrait, le panel est riche et possède le dynamisme des grands sauriens. Une force faussement tranquille, avec une souplesse et une volonté inflexible.
L'ensemble du set de BLACKTHREAD est donc très positif. D'une part parce que musicalement c'est agréable et reposant, mais aussi parce que le voyage musical s'avère riche en sensations.
Tout le public ne fut cependant pas aussi sensible que j'ai pu l'être puisque une bonne partie s'est contentée de discuter bruyamment au bar en attendant Scott Kelly. Donc, malgré tout, quel que soit le type de concert, les gens ne peuvent s'empêcher d'afficher de manière ostentatoire leur mépris et leur ignorance.
La seconde partie arrive, comme toujours au Glaz'art, très rapidement. On a à peine le temps de se fumer une clope que voilà le début du set suivant.
Arrive sur scène Mr. Scott Kelly. Le type est un peu raviné par l'âge et les excès en tous genres, ressemblant plutôt à un bluesman vieillissant qu'a un excité du bulbe comme on pourrait l'envisager du fondateur de NEUROSIS.
Le set va s'articuler en deux parties, avec une évolution continue sur son ensemble.
Tout comme l'avait annoncé le dossier de presse, Scott Kelly nous propose tout d'abord une entrée en matière très rock'n'blues, accompagné par sa guitare. Beaucoup de sentiments dans les compositions, beaucoup de réflexions, parfois même de tristesse. La voix a cette teinte de tabac de Virginie et de Bourbon du Kentucky vieillit en fut de chêne. Ça gratte la gorge et çà fait monter les larmes aux yeux. Musicalement c'est beaucoup moins éthéré que la précédente performance, plus actuel. On sent les odeurs d'essence, l'eau qui court dans un caniveau chauffé par le soleil de Memphis. La première partie m'a faite penser à Johnny Cash en fait. Ensuite, les canons du rock sont respectés à la lettre. Le monsieur connait son boulot, sait de quoi il en retourne, et le rendu est excellent. La populace semble transcendée par le personnage et sa performance. Celle-ci est complètement dépouillée de chichi et autres artifices, c'est la renommée de S.K. et la qualité du set qui fidélisent le public. Et pourtant, durant le premier tiers, le monsieur ne semble pas vraiment trop dans son élément et il en ressort même une petite touche d'appréhension et d'angoisse, faussement dissimulés par son apparente concentration. Il semble que Scott Kelly ait à cœur de réaliser une bonne performance, mais avant tout, de rasséréner un public exigeant, qui le connait peut-être plus pour ses explosions auditives dans NEUROSIS. En cela, la seconde partie du set sera donc plus proche des attentes de parterre. Elle sera en effet plus « sonore » et Scott Kelly utilisera largement plus sa guitare en termes d'instrument qu'en termes de soutien pour ses compositions. Il nous propose donc une couleur musicale plus brillante, avec les phénomènes de la distorsion, de la réverbération ou du retour qu'il maîtrise dans NEUROSIS.
Le public est pris à bras le corps, subtilement ficelé et emballé après le second morceau de cette partie.
Ensuite, pour tout dire, j'ai un peu perdu le fil. Entre mon avis de déblatérer et le fait de ne pas tenir en place, j'ai surtout le souvenir d'une impression de contentement final, émanant des gens présents ce soir là. Scott Kelly s'avère être quelqu'un de plutôt sympathique, disponible et généreux envers son public.
Une très bonne soirée donc, quand bien même ce n'est pas la musique qui en fut le centre d'intérêt principal.
Deux groupes assez différents en substance, deux ambiances cependant assez complémentaires. BLACKTHREAD a permis de décharger la salle de sa pression et de son stress afin de pouvoir ensuite accueillir dans les meilleures conditions possible Scott Kelly. La performance du rocker aura été satisfaisante pour le public. On ne peut donc qu'espérer que pour lui aussi, le parie aura été tenu, comme il le souhaitait au départ avec fébrilité. Et puis un gros merci à Pierre-Georges pour sa patience quant à mon flot de paroles durant le concert. Moi j'ai beaucoup aimé son set et pour çà, il fallait que je le dise à tout prix (CD dans le sac au retour ce n’est pas peu dire).
05 mars, 2010
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