J'avoue tout. Mea Culpa. Je ne suis pas une fan de YEAR OF NO LIGHT de la première heure, c'est à dire d'au moins 2006, date de sortie du premier album. Non j'ai découvert le son du groupe il y a tout juste une semaine. Mais j'ai eu une épiphanie il faut bien le dire. Le hasard jouant en ma faveur pour le coup, ce qui est relativement rare, j'ai eu connaissance il y a une semaine justement qu'ils étaient en tournée sur Paris. Après avoir rongé mon frein pendant 3 bonnes heures, j'ai décidé d'être folle et de grever un peu plus mon petit budget et, d'écouter mon coeur.
Je n'attendais rien du tout du reste de la soirée, je ne connaissais même pas l'espace POINT FMR. Ensuite, comme la programmation était assurée par AMORTOUT, je m'attendais au moins à une soirée qui toucherait au domaine de « l'étrange ».
Résultat des comptes, j'ai passé un excellent concert, et je peux même dire que j'ai pris une sacrée claque puisque les trois formations m'ont proposée, tout du moins à moi seule, un son excellent.
L'espace POINT EPHEMERE est un centre artistique situé sur le Quai de Valmy. L'endroit ressemble à une image d'Epinal de Paris ; Les quais pavés, les canaux de la Seine, un soleil de printemps pour un temps relativement doux. Mais pas de robe à fleurs ni de béret coquin pour l'occasion : Un public majoritairement en noir, même si l'on peut reconnaître de nombreuses sous-cultures différentes. Disons-le clairement, j'ai suivi les T-Shirt de NEUBAUTEN et RED SPAROWES pour être sure de ne pas me tromper... Ensuite, on peut aussi y croiser du style « Dark Folk », du « Metalhead », du « Vampyre » et même, j'y ai vu le sosie de Marine Le Pen avec un beau à chemise rayée et blazer bleu marine (ce qui me fait toujours halluciner d'ailleurs que l'on puisse, en étant jeune, s'accoutrer comme cela. Qu'est-ce que çà vieillit …). Il semble que pour l'occasion de ce rendez-vous numéro 4 des « bonnes manière », les gens aient répondu présent ; Certes on ne se marche pas dessus, mais, en proportion de l'endroit, ainsi que de l'affiche, les gens ont répondu présent. Phénomène un peu étrange pour moi en fait, puisque je considère au départ que les scènes Metal originelles sont à même de toucher un public plus vaste.
AMORTOUT gère sa programmation d'une main de fer ; MENACE RUINE, prévu à 20H30 va commencer son set à 20H40 tappante à mon horloge. C'est plutôt une bonne chose lorsque l'on envisage déjà avec appréhension la journée de travail du lendemain, étant par nature un « ferret-like » dormeur (qui a parfois, en temps normal, déjà bien du mal à se réveiller). On aura beau me dire ce qu'on veut : MENACE RUINE ce n'est pas du Metal. N'en déplaise aux extrémistes du genre, qui ont un peu trop tendance en ce moment à considérer que chaque nouvelle sonorité découle du Black Metal (non mais faut pas déconner non plus ; BRIGHTER DEATH NOW n'a jamais été du Metal !!!), MENACE RUINE ne propose pas des compositions dans le genre sus-nommé. MENACE RUINE, c'est de l'Indus ; Et du bon d'ailleurs. La seule empreinte que l'on pourrait reconnaître au Black Metal c'est le screaming relativement hight pitch de S. DE LA MOTH (nom plutôt amusant pour un lieu qui sent de base le renfermé héhé). Au programme donc : deux protagonistes, des samplers, claviers, micros et c'est tout. Pas le moindre instruments « organiques » et c'est très bien comme çà. Le premier morceau m'a indubitablement replongé plus de dix ans en arrière, à l'époque où j'écoutais MZ.412 et que j'étais très très branchée COLD MEAT. Le son de l'indus était rafraichissant à l'époque justement ; une grande liberté de création, des explorations dans toutes les directions également et, pour le coup des MZ, des sonorités qui tendaient à se rapprocher de la scène Black, en reprenant même l'esthétique du genre. Mais jamais on ne leur a collé à l'époque cette étiquette hérétique de «black-atmospheric » ou bien encore « ambient-black ». Je m'insurgerai toujours et jusqu'à ma mort contre l'annexation de la scène Indus par celle du Metal. Bon en tous cas, je prends ma première claque de la soirée ; la programmation est très bonne, les boucles utilisées sont originales, l'ensemble est bien samplé et le son général de la salle est très correcte. Tout le monde dans le public ne semble par contre pas de cet avis et, pour les « bas du front », c'est même plutôt chiant à tel point qu'on en parasite de ses conversations ineptes, le public sensible à la performance. La seconde pièce présentée par le groupe présente à mon goût des influences différentes. « Utterly Destitute » me fait indubitablement penser à un mélange entre THE MOON LAY HIDDEN BENEATH A CLOUD et LOREENA MCKENNITT (marrant parce qu’elle est aussi originaire du Canada). On y trouve un côté très folk, grâce à la tessiture de la voix de GENEVIEVE ainsi que par le côté biniou-sample ; mais également des empreintes très indus martial, relatifs aux rythmiques utilisées par le groupe. Les jeux de lumières sont d'ailleurs très bien utilisés; ils le seront d'ailleurs tout du long de la soirée, mais l'effet rendu sur la demoiselle lui confère un côté irrationnel et impalpable. Elle me fait penser, de là où je suis à LISA GERRARD, telle qu'elle apparaît dans la vidéo de « Frontière ». Auréolée de la lumière, qui joue et s’entremêle dans ses cheveux, l'on hésite tout bonnement entre l'esprit du Séraphin et l'image de la « Witch ». Sans les chichis qui vont avec, je leur trouve quand même un petit côté FAITH & THE MUSE aussi...Le reste du set présente encore d'autres genres dans lesquels ils semblent avoir puisé : une empreinte Rock Psychédélique, qui me rappelle entre autre ROSE McDOWALL, un côté, je le redis, assez martial, résurgences pour moi de TRIARII ou SOPHIA, même s'il faut creuser un peu plus pour ce dernier (la base de l'indus martial quand même... ; j'aime, tout simplement). Le son de MENACE RUINE est très moderne ; et çà me fait plaisir, même si l'on peut leur coller une autre étiquette, de me rendre compte que la scène Indus propose encore d'excellentes créations. Le genre est parfaitement représenté avec eux, puisque l'on reste dans cette dynamique d'atmosphère confinée à la limite de l'asphyxiante, dans cette composition cyclique et répétitive, mais qui sait se déployer par collages successifs et modulations subtiles. On retrouve également en cela, un petit côté ULF SODERBERG, même si les influences rituelles et cultuelles utilisées rappelles plus celles d'HAGALAZ'RUNEDANCE. Il faut bien reconnaître alors que l'écoute n'est pas du tout la même d'une Scène à une autre ; d'un point de vue purement sensible, j'avancerais même que ce ne sont pas du tout les même parties de mon cerveau qui semblent travailler.
Donc une excellente première partie avec MENACE RUIN, qui aura su me laver les oreilles et me redonner espoir dans la scène Indus que j'envisageais belle et bien morte et enterrée. Juste, elle change d’appellation ce qui, je dois bien le reconnaître ne peut lui permettre que de toucher plus de gens.
Je ressors de la salle emballée il faut bien le dire. Rare s'il en est que dès la première partie, je me paye un aussi grand sourire niais et cette impression de contentement bienheureux sur le visage.
Tout juste le temps de prendre l'air que ALUK TODOLO a déjà attaqué le début de son set.
Tout comme pour son projet solo, Electronic, SHANTIDAS accentue l'effet insaisissable de ses performances à l'aide de beaucoup beaucoup de fumée. Cela donne, dans le cas présent, une impression de THE MIST, soutenue par le son qu'il produit ce soir. Son radicalement différent de prime abord à ce que j'avais pu découvrir précédemment. ALUK TODOLO propose en effet une musique 'plus organique' puisqu'il s'inscrit dans la vague là, précisément, de post-Metal ou Post-Black, avec un côté Shoegaze fort appréciable (aka, c'est du cirage). Le projet présenté est purement instrumental d'ailleurs. Une basse, une batterie, une guitare, le tout utilisé avec une très grosse saturation et une rythmique simple mais non-linéaire. Beaucoup d'influences là encore, même si on oublie pour cette fois l'Indus et l'Electronica ; on les oublie d'ailleurs dans la composition puisque leur empreinte s'avère quand même bien palpable. Juste, au lieu d'utiliser des samplers pour produire les loops, ce sont les cordes qui s'en charge. On retrouve donc en fait ce côté cyclique et monomaniaque que l'on à dans les productions de, par exemple, WINTERKÄLTE. Le son général est relativement agressif, dynamique, bourré d'une grande énergie latente et soutenue. Comme toutes les compositions du post-Metal et même du prog-Metal, les pièces sont articulées autours de la rythmique ; même si le Death Metal appuie en général sur le blast-beat, avec son effet habituel ronflant de sulfateuse et qui me donne personnellement toujours un grand tournis que j'adore, je suis encore plus férue de cette scène post ou prog dans laquelle les batteurs et leurs sets sont réellement intégrés en tant qu'instrument à part entière dans les groupes. Beaucoup d'impressions à se dégager d'un jeu au départ sans modulations réelles, mais qui réussit cependant à devenir sensitif et même, pour les meilleurs, sensuel. Dans le cas d'ALUK TODOLO par contre, la batterie est complètement intégrée aux chants. En ce sens, et cela s'est retrouvé dans certains passages du set, on s'approche parfois d'une démarche proche du Free Jazz. Tantôt des passages très coordonnées et très structurés, nécessaires à la pleine expression du style post/ prog, tantôt par contre, chacun des trois protagonistes donne l'illusion de jouer une partition en totale indépendance des deux autres. En totale inadéquation avec le jazz, on retrouve aussi dans le son et surtout la manière de les arranger, un petit côté Punk Garage années 80. Cet aspect apporte une certaine désinvolture à l'ensemble du set, allégeant un peu le côté très lourd de leur Doom Metal (et j'en connais qui vont jubiler en lisant que je parle de Doom Metal pour définir du post rock. Et oui, même moi j'y viens...).
Un côté très lourd dans son ensemble donc pour ALUK TODOLO. Un set qui me plait beaucoup. On est désormais bien loin des premières compositions qui étaient beaucoup plus Indus-Ritual et beaucoup moins authentique que ce que le groupe produit désormais.
SHANTIDAS à un nez très fin en matière de sons et ses goûts ont actuellement le vent en poupe.
Je remercie alors mon esprit tellement monomiaque. En effet c'est d'avoir bouffé pendant 5 jours d'affilés le dernier album de YEAR OF NO LIGHT qui m'a fait rentrer aussi sec dans la salle alors que j'étais encore partie dans une diarrhée verbale sans fin en m'adonnant à la nicotine.
Je dois confesser avec grande honte que je ne m'étais pas du tout arrêtée sur le line up habituel du groupe ; c'est donc pourquoi j'ai pris une grooooooooooooooooooooooooosse claque en les voyant sur scène. 3 guitares, 1 basse, 2 batteurs, rien de moins, les claviers étant assurés le cas échéant par l'un ou l'autre des partis. Ca fait du monde sur scène, il faut bien l'avouer. Les cordes joueront le dos au public, entourant les deux sets de percussions. Il est à noter que chacun des musiciens possède son propre look qu'il accorde d'un gestuelle propre. Du Metalhead à cheveux longs, on passe par le pur stoner, rock indé, et même, pour l'un des perçu, un style Hipster. Le son est énorme, et cependant extrêmement bien balancé. A la différence de l'étiquette qui leur est en général collée, le post-Metal du groupe, en tous cas pour « AUSSERWELT », n'a pas ce côté maladif et psycho-cyclique que l'on trouve généralement dans le Drone-Doom. Etant pourtant férue de (bonne) musique bruitiste, j'avoue avoir du mal à y sentir l'inspiration de l'industrial . On a cependant bien les grosses distro et les grosses saturations, les morceaux longs mais YONL passe au delà du genre premier. Les pièces jouées (exclusivement le dernier album, c'est à dire 4 pistes dont « PERSEPHONE » qui se joue en deux actes) sont relativement dynamiques et légères en comparaison aux canons du genre ; On est bien loin de SUNN O))) ou même de BORIS. Pas de redondance cyclique, plutôt des compositions basées sur une mélodie avec introduction, développement, refrain et variantes, le tout sur des tons qui ne touchent dans la dissonance qu'au mieux à la quinte du loup. Ce n'est pas non plus de l'art jovial, on n'aborde en rien la folk. Mais, il faut reconnaître à YONL une composition qui, même basée sur des harmonies minimalistes, tend plus ou moins à s'apparenter à une composition symphonique moderne ou, dans le cas de la soirée 'Post-Moderne'. « AUSSERWELT » m'a profondément touché au cœur, mais la performance live touche mon âme pour le moins. Sur scène, c'est la même chose qu'en CD mais en plus passionné. Les passages psychotiques, dans « HIEROPHANTE » entre autre s'instillent dans le cerveau en faisant résonner la corde paranoïaque et les passages plus 'Stoner' de « PERSEPHONE – Coré » sont d'un poids abyssal (effet révélé de par l'allongement du tempo au delà du 1 pour 2). Les jeux de lumières sont simples mais parfaitement posés et en accord avec leur musique ; les dits passages neuro-sensitifs sont entre autres accompagnés de stroboscope, appuyant de fait l'effet auditif. Pas de blast-beat là encore, mais une rythmique (double rappelons le) complexe, brillante et d'une extrême souplesse d'écoute. Les deux sets ont clairement leur place d'instruments lyriques ; une fois encore et surtout dans le cas de nos très chers amis Bordelais, ce sont les percussions qui conduisent la danse et qui insufflent au morceau sa vie. Beaucoup d'influences justement dans leur jeu, puisque l'on y retrouve un côté très ritual, Doom ou Stoner également, mais surtout une globalité que j'apparente à l'exécution symphonique (on en revient cette fois-ci aux post-minimalistes). Les mélodies des cordes sont généralement autonomes, mais respectent de manière quasi-dogmatique les règles de composition des impressionnistes et autres post-romantiques. YONL offre à son auditoire une musique sensitive qui appuie douloureusement sur la corde de la synesthésie. Je ne peux m'empêcher d'associer leur musique aux préraphaëlites ainsi qu'à l'art nouveau, avec pour lien les illustrations érotico-macabre de Mossa. Autant dire que ce que j'écoute me donne le tournis et me remplit à la fois d'une grande joie ainsi que d'une grande affliction façon Stendhal... Le set ne durera pas plus des 4 pistes de l'album et le groupe s'avère relativement timide de l'enthousiasme débordant d'un public conquis. Pour ma part je viens de vivre une véritable épiphanie et je ne sais pas trop s'il faut briser le charme en applaudissant les artistes.
Je suis relativement bon public je l'accorde sans hésiter. Mais le concert de ce soir, totalement improvisé sur mon planning m'a non seulement tourneboulée mais également confortée dans mes goûts premiers. A bien y réfléchir, je me rends compte que, d'aimer les musiques soit très anciennes soit réellement moderne, avec des groupes comme YONL ou MENACE RUINE, ce sont surtout les post-modernes qui m'intéressent. Ce qui m'attire ce n'est pas le style, çà ne le sera jamais (vous aurez beau pomponner une mule çà n'en fera jamais un cheval de course) ; ce qui m'intéresse, en général mis en avant par l'ensemble de ces scènes, c'est la démarche sensible. Le death m'intéresse par ses rythmiques brisées, les musiques post-rock et indus, dans certains cas, par leur travail et leur recherche sur le son. Les styles précédemment énumérés ne s’appréhendent pas du tout de la même oreille et c'est, je pense, une grave erreur que d'en attendre les mêmes choses. L'on reste bien évidemment dans la niche de musiques 'sensationnalistes', mais, comme je l'ai précédemment dit, on n'utilise pas les mêmes parties ni de son corps, ni de son esprit ( même si d'un point de vue purement organique çà passe toujours par les esgourdes).
Les trois groupes sont actuellement en tournée. Ne serait-ce que pour l'expérience je ne saurais que trop peu conseiller d'y aller traîner ses guêtres. YONL fera entre autres quelques dates avec un autre excellent groupe qu'il me faudra voir un jour NADJA. En attendant, je me repais toujours des 4 points cardinaux, boussole onirique qui me fait voyager dans les Contrées du Rêve.
25 avril, 2011
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